lundi 11 avril 2016

ECO-TRAIL 2016 - 80 km 1ère en Marche Nordique


ECO-TRAIL DE PARIS 2016 - 80 km
1ère en Marche Nordique

La Marche Nordique, c’est pas du bidon !





Ah, l’Eco-Trail de Paris !

Déjà une longue histoire

2008, c’était la première édition de l’épreuve (80km uniquement) … et mon tout premier trail !
Une époque où je me demandais sérieusement « mais comment font ces fous pour courir de telles distances ??! ». Avec le chemin parcouru depuis lors (UTMB, Marathon des Sables…), cette réflexion me fait bien sourire à postériori, même si le challenge d’un 80km n’est jamais anodin.

Bien d’autres participations ont suivi (80 et 50), jusqu’à 2013 et la découverte « forcée » de la Marche Nordique (MN)… conclu par un succès inattendu sur l’épreuve ! J Présent à toutes les éditions, 2015 fut même l’occasion de participer différemment, en œuvrant comme « conseiller technique » et juge sur la Marche Nordique.


  




  










16 Mars 2013  30 km Marche Nordique chronométrée

















29 Mars 2014 (30km MN)     
16 mars 2015 (organisation MN) 

                                               

Bref, à l’approche de 2016, la question s’est résumée à : « et maintenant, qu’est-ce qu’on se fait ?! »
Hésitant entre 2 défis : viser une nouvelle perf’ sur le 30 MN, et essayer le 80 en 100% MN (!), j’ai finalement décidé d’opter pour la tentative d’une première :

Réussir le 80 en marchant… à très bon rythme !

La première chose avant de me lancer a été d’essayer d’évaluer la faisabilité, en regardant les barrières horaires.

Pour faire simple, il s’agit d’aller au moins du 6,5 km/h pendant plus de 12 heures d’affilée. Si on tient compte du dénivelé (1500m), cela correspond même à l’équivalent de 7,5km/h sur du plat…
A mon crédit : une large et double expérience de la MN et des très longues distances en trail.
En ma défaveur : aucune pratique combinant longue durée et vitesse, sans courir.

Ceci étant, pour l’avoir largement testé sur de grandes courses, la pratique de la Marche Nordique est un vrai plus en trail à double titre :
ü  A l’entrainement, la MN soulage très utilement les articulations (chocs 4 fois moindres qu’en course à pied) et permet de bien s’améliorer sur les parties en dénivelé.
ü  En course, la MN contribue à bien gérer le rythme et avancer avec plus d’efficacité dans la durée. Les efforts sont particulièrement optimisés.
D’ailleurs de nombreux amis l’ont intégré avec succès dans leur préparation et progression en trail. Même les meilleurs mondiaux savent utiliser les bâtons dans les courses de montagne pour mieux grimper. Xavier Thévenard, double vainqueur de l’UTMB, l’a largement démontré.

Finalement, le défi de l’Eco-Trail, qui est une course assez rapide où l’on court majoritairement, s’annonce comme une capacité à garder un rythme soutenu.


SEMAINE DE COURSE :

Partagé entre excitation et appréhension, j’alterne entre confiance raisonnable et crainte d’excès d’optimisme. Depuis le 1er Janvier, je me suis bien entrainé (7h par semaine en moyenne, y compris de nombreuses reconnaissances de parties du parcours) et conclut que…
C’est en tentant le défi qu’on verra bien ce que ça donne !

J’ai la chance d’être invité en tant qu’ancien vainqueur et hérite (clin d’œil ?) du dossard 1968, mon année de naissance… à moins que cela soit en référence à la Révolution… par la Marche Nordique !  ;-) ;-)
Dernier signe favorable qui me donne la pêche : au moment de partir rejoindre le départ, je retrouve ma récente médaille des France MN que je recherchais désespérément depuis 3 mois J





Toute juste le temps d’aller profiter de mes amis au départ de l’Eco-Trail 30 MN et je fonce vers Saint Quentin en Yvelines. Je fais encore le plein de positif avec tous mes amis Kikoureurs au départ.

Toute courses confondues, la communauté sera encore représentée par plus de 70 coureurs venant de toute la France !


DEPART :
Sur le 80, nous sommes près de 2100 inscrits et 1800 à partir quand retentit le coup de pistolet. Le peloton s’ébroue et, sur les 3-4 premiers kilomètres, je me fais gentiment dépasser par le flot des coureurs (à l’exception d’un malotru un peu agressif !). Je salue de nombreux amis et nous nous souhaitons bonne chance.
Petit à petit je me trouve dans la paisible queue de peloton, mais loin d’être le dernier pour autant, car j’avance à plus de 8 km/h quand même…

Pour le 1er ravitaillement (Buc 23km) il faut viser du 7-7,5km/h pour passer la barrière horaire. Et au bout de 3h, il faudra être à peine essoufflé car cette partie est la plus facile, et correspondant à peine au premier quart de la course.

Un Kikoureur, Rodolphe alias « Namtar » (n°1480), m’a rejoint et nous entreprenons toute cette première partie ensemble. C’est bien agréable et les 20 kilomètres qui suivent passent d’autant plus vite. Je tiens ma vitesse de 8 km/h sans difficulté et me sens en pleine forme.

A la sortie des étangs de la Minière, au 18e km, une première surprise avec PatFinisher qui, en plus de ses panneaux d’encouragements, a carrément déroulé un tapis rouge !! Tout en filmant, Il me met gentiment la pression J
Quelques premières côtes me permettent déjà de doubler rapidement plusieurs coureurs. Je sens que je prends un peu d’avance sur mon objectif tout en restant dans un rythme sans excès.

Buc – 23km : 2h55 (objectif 3h10) – 1727e

J’arrive donc avec 1/4h d’avance et ne m’attarde pas (juste un plein d’eau par sécurité et le rangement de ma veste dans mon sac). Il fait un peu moins froid et surtout je sens que ça ira parfaitement jusqu’à la nuit.
Le temps de souhaiter bonne chance à Namtar, c’est désormais la fameuse montée de « l’Alpe d’Huez » (80m de dénivelé). Pour une fois Jean-Luc, alias « Tonton Trailer » n’est pas là pour les photos… trop occupé à exploser un chrono de -4h30 sur le 50km !
Avec l’enchainement des côtes, je double en continu de plus en plus de coureurs. Le mode Pacman est enclenché J. Je tourne régulièrement à 7 km/h (contre un objectif de 6,5) malgré le dénivelé incessant. C’est aussi un bonheur de retrouver tous ces chemins si souvent arpentés par le passé… mais « abandonnés » depuis 4 ans et mon arrêt forcé du running à l’entrainement.

Nous rentrons dans la jolie forêt de Versailles, quand un coureur (n°349) m’interpelle, soulignant qu’il remarque bien le « pro de la Marche Nordique » ;-) Nous discutons agréablement quelques minutes et nous encourageons mutuellement. Il espère finir, après un échec l’an passé… (et terminera 5mn avant la limite !)
Un peu plus loin, je retrouve un coureur (n°1987) qui m’avait intrigué au départ, car avec un charmant marmot en poussette ! Nous sommes au 34e km et il souffre dans la montée… Il doute de finir mais « se contentera de faire déjà un bout de chemin ». Je l’encourage alors vivement à s’accrocher et promet de parler de son défi… ce qui le motive ! (Il réussira son pari 15mn avant la limite J J )


Enfin, au milieu de tout ça, la course a déjà démarré depuis 5 heures et, sans raison apparente, j’ai l’impression d’avoir un peu moins la pêche ? Il ne faudrait pas que je ralentisse ne serait-ce que de 0,5 km/h ! Cela pourrait bien être un léger début d’hypoglycémie, aussi je mange quelque peu. Cela va vite mieux. Et l’inquiétude du coup de mou ne dure pas.
Je mets quand même la musique car le temps commence à paraître un peu long.

Velizy – 35km : 4h45 (objectif 5h05)

36e kilomètre, et nous rentrons dans la forêt de Vélizy. J’aperçois un lot de coureurs manifestement en train d’abandonner. Les dépassements me permettent de voir de plus en plus de coureurs en difficultés, dont la plupart sont encore peu aguerris… m’avouant souvent faire leur tout 1er ou 2e trail de ce type. Avec certains, c’est aussi un yoyo permanent car je les côtoierai pendant des heures !

C’est aussi l’occasion d’apercevoir de nombreux concurrents venant de l’étranger, jusqu’aux Philippines même ! Il y a plus d’une quinzaine de pays représentés, y compris des Américains, Japonais et… 40 Norvégiens. Petit à petit la course attire du monde de partout, et la Tour Eiffel est certainement un énorme attrait. En fait quand j’en discute autour de moi, c’est une motivation majeure que de monter au 1er étage. Moi-même suis tout excité à cette idée…

   














Kilomètre 41 quand nous franchissons le pont qui surplombe la N118… Et bien, je suis ravi ! C’est la fin du terrible « Mordor » (Yvelines)... et je rentre enfin dans « mes terres du Gondor ». Il reste encore un bon bout de chemin, mais je joue désormais à domicile J



Je retrouve vite « ma » cote de l’Anémomètre (40m D+) que je travaille souvent en boucle.
En haut un coureur me félicite et je l’encourage à mon tour.

Kilomètre 43 et une vive inquiétude me traverse : après mon talon droit et son inévitable ampoule (liée aux semelles orthopédiques), c’est le talon gauche qui me lance subitement. Je réalise alors n’avoir rien prévu pour les soigner et le ravito de Chaville est dans 2 heures ! Or une brûlure peut vite vous ruiner le rythme et la course…. Je tente de changer un peu ma foulée et miracle, la douleur s’estompe J

Enfin nous voilà dans le magnifique domaine des Apprentis Orphelins d’Auteuil. Je profite de la découverte de ces lieux somptueux avec une vue dégagée sur la capitale.




Apprentis Orphelins d’Auteuil – 46km : 6h28 (objectif 6h40) – 1619e

Petit plein d’eau avec l’idée de tenir ainsi jusqu’à St Cloud. Il va faire nuit mais je retarde la sortie de la frontale et veste. Curieusement, sans vent, il fait encore assez « doux ».

Nous enchainons vite avec l’entrée dans le Parc de l’Observatoire. C’est toujours aussi beau malgré une journée bien grise. Encore quelques photos et je profite des ultimes minutes du jour.
  

Il fait nuit et je suis les frontales devant moi avec l’idée de prendre la mienne à la sortie du Parc. Mais quand j’y suis, ma lampe ne marche pas à cause d’un faux contact !
« Euh ça va pas être possible là ! » mais finalement après plusieurs essais, tout en marchant évidemment, elle finit par s’allumer J

Je repense alors à mes amis de la MN chrono passés quelques heures avant et tente d’imaginer la bataille. Un peu plus tôt dans l’après-midi, j’avais appris les résultats et notamment la très belle 3e place de mon ami Bart. Depuis cet instant, sa performance me booste.

Ce n’est pas de trop car mon avance, qui aura culminé jusqu’à 25mn sur le tableau de marche, s’est réduit à une dizaine de minute. L’écart est assez constant mais révélateur de l’étroite marge dont je dispose. Il ne faut pas que je m’endorme une seconde !



La plus grosse surprise arrive alors. Il fait bien nuit et nous sommes en pleine forêt quand j’entends :
« Allez, bravo champion ! » Interloqué, je me retourne et découvre… Léo ! mon fils ainé.

« Mais comment tu m’as trouvé ?? sans connaître, ni le parcours, ni ces lieux, ni mon Roadbook ?? »

C’est oublier qu’un Geek est très dégourdi ! Il a géolocalisé mon Iphone et regardé en parallèle où il se trouvait… Cela me fait diablement plaisir et m’encourage vivement.





Chaville – 56km : 8h09 (objectif 8h15) – 1526e

Au ravito, j’envoie mon habituel bulletin SMS + photo à la maison : tout va bien !

Je m’offre une petite soupe mais elle est brulante et impossible à boire. En plus, en 3 minutes, j’attrape déjà froid.  Je repars donc très vite vers la suite. Le terrain est archi-connu pour moi. J’ai même dû répéter intégralement cette partie 3x fois dans les quinze jours précédents.

Enchainement de grandes descentes et montées et voici maintenant les étangs de Ville d’Avray. Je rate de peu mon ami Jacques mais me console avec toujours beaucoup de SMS d’encouragement.

Marne la Coquette : comme inscrit sur mon Roadbook, je rentre pile à 21h40 dans le Parc de St Cloud. Cela maintient bien la pression pour ne pas ralentir.
A hauteur du Stade Français, je commence à avoir trop froid et sort enfin ma veste, sans même attendre le ravitaillement proche.
La grosse côte qui y mène est avalée goulument en doublant quelques coureurs.

St Cloud – 70km : 10h09 (objectif 10h05) – 1456e

Je prends une nouvelle soupe mais elle encore trop bouillante. « On va la laisser refroidir le temps d’une photo »… mais ne peux quand même quasiment pas l’avaler.

Plus qu’une dizaine de kilomètres. Je suis maintenant totalement confiant d’arriver au bout, mais aimerais bien arriver à la Tour avant minuit, et finir Samedi plutôt que Dimanche ;-) 
Ça s’annonce juste, mais pas impossible…

Les quais ne sont pas terribles à cause des travaux mais en 2017 (?) cela devrait de nouveau être très sympa. Pour l’instant, il y a la nouvelle grimpette vers la côte des Gardes, et je souris à l’idée des têtes que certains ont dû faire en voyant cette difficulté inédite. Le bruit de mes bâtons à 23h doit aussi agacer un peu dans les immeubles environnants ;-)

Enfin, je n’ai qu’une chose en tête, retrouver ma petite famille à l’entrée du Parc de l’Ile St Germain.
Le Roadbook annonçait 23h10 et… je passe à 23h10 !! J

Ile St Germain – 74km : 10h55 (objectif 10h55)

Une bise à Marie et aux enfants et c’est reparti pour les 5 derniers kilomètres. J’avance à presque 7 km/h mais cela va être juste pour finir Samedi…

La ligne droite des l’ïle aux Cygnes me paraît interminable mais dès le pont de Bir Hakeim, je savoure l’arrivée proche. Plus que quelques mètres quand la Tour se met à scintiller ! Mince, il est minuit J
Pas grave, il faut profiter du spectacle.

  



Les passants m’encouragent et applaudissent ma montée des marches 2 par 2.
Passage devant le podium de la course avec un commentaire quelque peu étonné et admiratif du speaker.
Le moment est magique car tellement attendu, tandis les spectateurs vous font triplement savourer le moment. Je choppe mon ticket pour la montée et le range soigneusement.
Allez Go pour les marches ! Je les attaque 2 par 2 mais, comme en 2008 (!), me rend vite compte combien c’est mortel.






Ça me semble interminable, et en même temps, je tente d’en profiter car ce plaisir va trop vite passer.

Enfin la ligne :    Yes !!! Je l’ai fait J J








Tour Eiffel – 80km : 11h55 (objectif 12h00) – 1453e

Quelques photos et direction les récompenses : un joli T. Shirt de finisher + une médaille sympa. Tout le monde est joyeux malgré le froid et je découvre sur le tableau d’affichage un très joli classement : 1449e !!! (le classement final sera 1453e avec quasiment 350 personnes derrières (170 finishers après moi + 170 abandons)




Sophie, ma petite sœur, est arrivée 1 minute trop tard mais me récupère en bas ! Il fait froid et sa présence est une belle surprise qui me permet de bien finir la soirée : plat chaud à l’arrivée et retour à la maison à ses côtés. 

Epilogue :

Le lendemain, quasiment aucune douleur, juste de la fatigue et deux grosse ampoules aux talons, et surtout la grande satisfaction et fierté d’avoir relevé le défi.

La conclusion saute aux yeux : le niveau en Marche Nordique a énormément progressé et ses représentants ont des niveaux plus que respectables, avec toute leur place au côté des coureurs.
La frontière est de toute façon ténue en Trail et je suis persuadé que nous sommes nombreux à pouvoir relever ce genre de défis, y compris sur des courses roulantes comme l’Eco-Trail.

D’ailleurs, plusieurs amis Marcheurs semblent déjà tentés pour tenter l’expérience du 80 en 2017 !
A suivre…

Bertrand




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